18/10/19

Projet de loi n°7348 sur les comptes inactifs, les coffres-forts inactifs et les contrats d'assurance en déshérence

Le 6 août 2018, le projet de loi n°7348 sur les comptes inactifs, les coffres-forts inactifs et les contrats d'assurance en déshérence a été déposé à la Chambre des Députés du Luxembourg. Après les avis de la Chambre de Commerce et de la Commission nationale pour la protection des données, le Conseil d'État s'est également prononcé sur ce projet de loi en date du 21 mai 2019. La procédure législative se poursuit après la pause estivale et les observations des institutions susmentionnées devraient être prises en considération.

Le cadre juridique relatif aux comptes/coffres-forts inactifs et aux contrats d'assurance tombés en déshérence est actuellement très limité au Grand-Duché de Luxembourg. Jusqu'à présent, ces comptes, coffres-forts et contrats d'assurance ne sont régis que par le droit civil et les dispositions contractuelles applicables. Cela a suscité plusieurs questions et une forte insécurité juridique, y compris pour les établissements concernés. Le projet de loi vise à introduire un nouveau cadre juridique complet qui renforcera la protection des clients en établissant des obligations professionnelles pour les banques ou les assureurs.

Le projet de loi comporte trois grandes dimensions juridiques que l'on peut résumer comme suit :

la prévention, qui implique une série de mesures visant à prévenir l'inactivité par des procédures d’information et de recherches,
la consignation qui emporte l'obligation de consigner les actifs à la caisse de consignation (la "Caisse de consignation") après une inactivité prolongée, et
la restitution, qui comprend des dispositions concernant la restitution des avoirs déposés.

Selon le projet de loi, le point de départ de l'inactivité est :

pour les comptes, le jour à partir duquel le titulaire n'a effectué aucune opération relative au compte ni ne s’est autrement manifesté auprès de l’établissement bancaire,
pour les coffres-forts, le jour à partir duquel il n'y a pas eu de manifestation, sous quelque forme que ce soit, par le détenteur d'un coffre-fort auprès de l’établissement qui détient le coffre,
pour les contrats d'assurance, le jour à partir duquel l'entreprise d'assurance a connaissance de l'obligation de verser la prestation d'assurance au titre d'un contrat d'assurance et pour lequel aucun bénéficiaire n'a fait valoir un droit sur ces prestations.

En l’état actuel du projet de loi, les comptes bancaires ou les coffres-forts détenus auprès d'un établissement de crédit seront considérés comme inactifs si aucune transaction ou manifestation n'est enregistrée sur une période de six ans. Cette situation peut résulter de diverses causes (notamment le décès du titulaire du compte et l’ignorance de ses héritiers quant à l'existence du compte). La même définition s'applique aux contrats d'assurance, mais la période à prendre en considération en l'espèce est réduite à deux ans.

Des obligations communes émergent du projet de loi concernant les comptes bancaires, les coffres-forts et les contrats d'assurance. En effet, après l'identification d’une période prolongée sans manifestation, mais bien avant que des délais d’inactivité n’arrivent à terme, la banque ou l'assureur sera tenu d'informer le titulaire ou le ou les bénéficiaires effectifs. En l'absence de réponse, il lui faudra, si possible, effectuer d'autres recherches pour communiquer avec l'intervenant concerné. Dans le cas d'un coffre-fort, il sera ouvert conformément aux conditions énoncées dans le projet de loi.

Si malgré les mesures prises, l'inactivité persiste au-delà des délais prévus par le projet de loi, la banque ou l'assureur devra demander la consignation à la Caisse de Consignation des avoirs non réclamés inscrits au compte ou déposés dans le coffre-fort ou un montant équivalent aux prestations d'assurance à fournir et non réclamées par un bénéficiaire.

Selon le projet de loi, toute personne ayant un droit sur les biens consignés pourra soumettre à la Caisse de Consignation, par voie électronique ou postale, une demande de restitution. Les banques et les compagnies d'assurance coopèreront avec la Caisse de Consignation pour permettre à celle-ci d'identifier et d'analyser les droits du demandeur en restitution.

Il convient également de noter que les banques et les assureurs seront tenus d'identifier les comptes ou coffres inactifs et les contrats d'assurance en déshérence. Les informations devront être fournies sur une base annuelle à la Commission de Surveillance du secteur financier ou au Commissariat aux Assurances ainsi qu'à l'administration fiscale luxembourgeoise.

Comme indiqué plus haut, le 21 mai 2019, le Conseil d'État a rendu son avis sur le projet de loi. Tout en souscrivant d'une manière générale aux objectifs et à la formulation en général, le Conseil d'État souligne néanmoins certaines incohérences du projet de loi (par exemple en ce qui concerne la définition de l'inactivité) et relève également certaines incompatibilités, telles que le nouveau régime concernant l'obligation de consignation et la possibilité donnée à la Caisse de Consignation de refuser ladite consignation. Le Conseil d'État estime également qu'une indication du nombre de comptes bancaires, de coffres-forts ou de contrats d'assurance inactifs aurait été plus que bienvenue.

La procédure législative devrait maintenant se poursuivre et les observations du Conseil d'État, en particulier, seront prises en considération. Les règles régissant les comptes bancaires inactifs, les coffres-forts inactifs et les contrats d'assurance en déshérence sont donc en passe de connaître, dans les prochains mois, un développement considérable du fait de cette législation à venir, si elle est adoptée. Le cadre juridique étant complet, consolidé et obligatoire à cet égard, il apportera la sécurité juridique plus que nécessaire à toutes les parties prenantes concernées.

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