19/02/15

Le terme d’un avenant peut constituer une modification substantielle du contrat de travail

Dans une récente affaire, la Cour d'appel (Cour d'appel, 5 décembre 2014, n°38929 du rôle) a clarifié une question de droit visant à préciser la portée de l'article L.121-7 du Code du travail.

Dans l'affaire visée, une salariée réclamait que soit déclaré nul son licenciement intervenu suite à son désaccord exprimé sur les modifications substantielles de son contrat de travail.

La modification substantielle consistait, dans le cas d'espèce, en la diminution de son salaire. Or, l'article L.121-7 du Code du travail régit les conditions de la modification essentielle du contrat de travail ainsi que le formalisme y afférant en prévoyant que « toute modification en défaveur du salarié portant sur une clause essentielle du contrat de travail, doit sous peine de nullité, être notifiée au salarié dans les formes et délais prévus aux articles L.124-2 et L.124-3 et indiquer la date à laquelle elle sort ses effets. [...] La résiliation du contrat de travail découlant du refus du salarié d'accepter la modification lui notifiée constitue un licenciement susceptible de recours judiciaire visé à l'article L.124-11. ». Ainsi, un salarié faisant l'objet d'une modification substantielle de son contrat de travail dispose, à l'issue des délais prévus à l'article L.124-3 du Code du travail, de la faculté de résilier le contrat de travail s'il refuse la modification ou de l'accepter et maintenir son emploi avec les nouvelles conditions en vigueur à l'expiration des délais.

En l'espèce, la modification a été notifiée avec un préavis de dix-sept jours alors que ce dernier aurait dû être de six mois eu égard à l'ancienneté de service de la salariée. Cette dernière a refusé la modification de son contrat de travail, à savoir la diminution de son salaire, mais elle n'a pas pour autant rompu les relations de travail. C'est sur ce fondement juridique que le juge en première instance a débouté la salariée de sa demande en annulation des modifications essentielles de son contrat de travail et a donné gain de cause à son employeur en maintenant la résiliation du contrat de travail.

La salariée a donc fait appel pour que soit reconnu le non-respect des dispositions de l'article L.121-7 du Code du travail. La Cour d'appel a ainsi été amenée à habilement déplacer la question de la résiliation du contrat de travail suite au refus de la modification de celui-ci sur la régularité de la modification essentielle du contrat de travail.

Analysons en ce sens les faits pour expliquer l'argumentation sur laquelle s'est fondée la Cour d'appel.

La salariée a conclu avec son employeur un contrat de travail le 31 janvier 2003. Dès son embauche, et ce jusqu'à mai 2010, la salariée a, par le biais d'avenants, été mise à disposition et a exercé ses fonctions dans d'autres sociétés du groupe de son employeur.

Durant sa période de mise à disposition, sa rémunération a substantiellement augmenté. Or, lorsque les conventions ont pris fin en 2010, l'employeur a modifié le contrat de travail de la salariée en lui conférant de nouvelles fonctions avec une rémunération moindre à la clé tout en estimant que celle-ci était supérieure à celle perçue avant ses mises à disposition.

La Cour d'appel a accueilli positivement la demande de la salariée, arguant que « l'article 121-7 ne perd pas son caractère obligatoire du fait de conventions modificatives temporaires du contrat de travail conclues entre l'employeur et le salarié. ». Par conséquent, peu importe que l'augmentation de la rémunération sur la période 2003-2010 résultait d'un avenant temporaire, la diminution qui s'en est suivie constitue bel et bien une modification substantielle du contrat de travail, et ce indépendamment du fait que la modification ait été prévue à l'avance et pour une durée déterminée, le caractère temporel de l'avenant est un non-argument.

Force est de constater que l'avenant temporaire, issu d'une convention de mise à disposition, demeure une modification substantielle du contrat de travail. Dès lors, c'est à bon droit que l'employeur doit notifier ladite modification avec un préavis légal tel que le prévoit l'article L.121-7 du Code du travail. Cette notification n'ayant pas respecté le délai en l'espèce, la Cour d'appel a donc déclaré la nullité des modifications du contrat de travail et le maintien des anciennes conditions de travail de la salariée, en l'occurrence sa rémunération.

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