11/06/18

Convocation à l’entretien préalable – formalité substantielle au licenciement – notion d’unité économique et sociale

« La juridiction du travail qui conclut à l’irrégularité formelle du licenciement en raison de la violation d’une formalité qu’elle juge substantielle doit examiner le fond du litige et condamner l’employeur, si elle juge que le licenciement n’est pas abusif quant au fond, à verser au salarié une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire. L’indemnité visée à l’alinéa qui précède ne peut être accordée lorsque la juridiction du travail juge le licenciement abusif quant au fond. »

A, dont l’appel est limité à la régularité de son licenciement, fait grief au tribunal du travail de ne pas lui avoir alloué une indemnité correspondant à un mois de salaire sur base de l’article L.124-12 (3) du code du travail pour non-respect par l’employeur de son obligation de procéder à un entretien préalable lorsque son personnel atteint le nombre de 150 personnes conformément à l’article L.124-2(1) alinéa 1 du même code, d’avoir retenu qu’il appartenait au salarié de prouver le nombre de salariés occupés par l’employeur et d’avoir décidé que ce dernier n’occupait pas le seuil de 150 salariés, respectivement ne faisait pas partie d’une unité économique et sociale constituée au sein du groupe S1.

L’intimée conclut principalement à la confirmation du jugement entrepris. Subsidiairement, elle demande à la Cour, en cas de condamnation, d’arbitrer ex aequo et bono le montant de cette indemnité.

D’après l’article L.124-2 (1) alinéa 1 du code du travail

« Lorsque l’employeur qui occupe cent cinquante salariés au moins envisage de licencier un salarié, il doit, avant toute décision, convoquer l’intéressé par lettre recommandée ou par écrit dûment certifié par un récépissé en lui indiquant l’objet de la Convocation ainsi que la date, l’heure et le lieu de l’entretien. Copie de la lettre de convocation doit être adressée à la délégation principale d’établissement s’il en existe, sinon à l’Inspection du travail. »

En l’espèce, il résulte du contrat de travail signé entre parties que A était au service de la société S1 SA avec siège à L-(…), avec la considération que la prédite société est une succursale de la société de droit belge S1 SA ayant son siège social à B-(…), représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, et ayant une succursale à Luxembourg sis à L-(…), qui figure en qualité d’employeur de A dans tous les actes de procédure des deux instances.

Dans ses conclusions notifiées le 15 octobre 2017, l’employeur indique qu’il « ne conteste pas avoir plus de 150 salariés en Belgique. Néanmoins, l’effectif de ses salariés dans l’établissement à Luxembourg est nettement inférieur à 150 salariés de sorte qu’elle n’avait pas à respecter les prescriptions de l’article L.124-2 du code du travail en cas de licenciement, en l’occurrence d’organiser un entretien
préalable à Monsieur A avant son licenciement. »

Il suit de cet aveu judiciaire, que l’employeur de A, la société de droit belge S1 SA occupait plus de 150 salariés au moment du licenciement et aurait partant du procéder, conformément à l’article L.124-2 (1) alinéa 1 du code du travail à un entretien préalable, ce qu’il est cependant resté en défaut de faire.

Dans la mesure où l’établissement exploité par la société de droit belge S1 SA à Luxembourg ne constitue qu’une succursale, il devient irrelevant de connaître le nombre exact des salariés travaillant à Luxembourg.

Selon l’article L.124-2 (4) du code du travail, « le licenciement notifié sans observation de la procédure prévue au présent article (entretien préalable) est irrégulier pour vice de forme ».

La sanction de cette irrégularité de forme est prévue à l’article L.124-12 (3) qui dispose : « La juridiction du travail qui conclut à l’irrégularité formelle du licenciement en raison de la violation d’une formalité qu’elle juge substantielle doit examiner le fond du litige et condamner l’employeur, si elle juge que le licenciement n’est pas abusif quant au fond, à verser au salarié une indemnité qui
ne peut être supérieure à un mois de salaire. L’indemnité visée à l’alinéa qui précède ne peut être accordée lorsque la
juridiction du travail juge le licenciement abusif quant au fond. »

La formalité de l’entretien préalable est substantielle dès lors qu’elle permet, d’une part à l’employeur d’informer le salarié sur ses intentions de le licencier, de lui expliquer les raisons de sa décision, d’autre part au salarié de prendre position et de se défendre, éventuellement en présence d’un représentant syndical ou d’un membre de la délégation du personnel.

Le licenciement de A ayant été déclaré régulier par le tribunal du travail, le salarié peut partant prétendre à une indemnité évaluée ex aequo et bono à un mois de salaire, soit au montant brut réclamé de 2.898,83 euros. (C.S.J., III, 01/02/2018, 44798).

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